Port des Barques

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vendredi 1 février 2019

Par un jour froid, une pensée pour les roitelets



Description de cette image, également commentée ci-après

        Dans un grand arbre, un roitelet
        Chante sa chanson la plus pure…
        L’arbre semble un cœur qui parlait.
        Et le chant semble une verdure.
        Est-ce, dans l’eau d’un ruisselet,
        Le sceptre ou la branche qui dure ?
        Dans un grand arbre, un roitelet
        Chante sa chanson la plus pure.
        C’est un soir presque violet
        Où l’on donne, d’un cœur parfait,
        Tant d’importance à la nature
        Que l’on confondrait, je vous le jure,
        Un roi avec un roitelet !

        Rosemonde Gérard.

        Ce poème m'évoque un souvenir de ma scolarité. J'avais toujours la meilleure note en "récitation", matière où j'excellais, autant pour ma rapidité à apprendre les textes que pour ma diction, un don du ciel, qui venait compenser ma sainte horreur des divisions à deux chiffres et de l'algèbre par la suite…
Rosemonde Gérard était femme, elle avait osé écrire de la poésie et avait été lue et publiée! En secret,  je pouvais imaginer un "avenir" possible au moins dans ce domaine !

Les circonstances de la vie m'offrirent, par hasard, l'occasion de visiter Arnaga, la jolie maison  près de Cambo Les Bains, dans les Pyrénées occidentales, que fit bâtir Edmond Rostand, son époux.Très vite, Rosemonde Gérard s'y ennuya, divorça et reprit sa vie parisienne.

         Aujourd'hui, lisant un livre de Bernd Heinrich, intitulé Survivre à l'hiver, paru chez Biophilia, en octobre 2018, je tombe sur un chapitre où l'auteur compare les chances de survie en l'hiver d'un homme lambda à celles d'un "roitelet":

         8.Les plumes du roitelet

         Le vent, qui fouette les arbres en traversant les sapinières du nord, résonne comme des vagues déferlantes, même quand le thermomètre marque systématiquement -20°C, et parfois -30°C. Je porte des pantalons de laine, deux chandails – (ce qui est également mon cas, en ce moment, dans mon appartement mal chauffé) – un coupe vent, une casquette de laine, des gants munis de séparateurs, des chaussettes en laine – (idem) et des bottes isothermes. Si j'enlève mes gants, mes doigts s'ankylosent en quelques minutes. Les habits sont primordiaux pour rester en vie, même la journée.
Le froid n'est pas simplement une abstraction. Comment font donc les roitelets, qui sont là dehors, de jour comme de nuit, et qui ne sont pas plus gros que le bout de mon pouce, pour conserver une température corporelle proche de 43°C ou 44°C ? Leur température est supérieure de quelque 3°C à celle de la plupart des oiseaux. Pour disposer d'une perspective plus parlante, c'est 6°C à 7°C de plus
qu'un humain en bonne santé – bon nombre d'entre nous succomberions à une crise cardiaque avec une telle température.
          Un roitelet, qui a la taille d'un colibri, lorsqu'il bombe le torse dans sa livrée olive pâle, ressemble à une petite boule pelucheuse. Les propriétés physiques du réchauffement et du refroidissement font que ces petites choses se frigorifient rapidement, puisque n'importe qu'elle partie d'eux-mêmes est proche de la surface, où la chaleur se dissipe. Proportionnellement, plus petit sera l'animal, plus grande sera la surface de déperdition. Dès lors, comment ces minuscules passereaux
parviendraient-ils à survivre ne serait-ce que cinq minutes un jour d'hiver ? Je sais pourtant qu'ils sont là.
          Après les avoir cherchés dans les bois depuis environ une heure de n'importe quel matin, je perçois généralement les légers tsees des roitelets proches. Je ressens de l'émerveillement et, même après avoir exploré les forêts des centaines de fois par des journées glaciales, je reste toujours ébahi
que quelque chose d'aussi petit et d'aussi dépendant de la chaleur puisse survivre. Leurs appels me
donnent l'assurance qu'ils ont déjà survécu à une autre nuit, et qu'en fin de compte je dois faire confiance à mes sens plus qu'à ma rationalité.

 in Survivre à l'hiver, Bernd Heinrich, éditions Corti, collection Biophilia, 2018, p.p.121/122

L'auteur précise aussi que les roitelets sont nommés "petits rois" à cause de leur couronne jaune citron brillante, orange et rouge et qu'apparemment la femelle bâtit seule le nid, mais que le mâle l'accompagne et chante tandis qu'elle rassemble les matériaux et qu'elle le construit. J'en conclus que les "roitelettes" n'ont pas eu vent de Mai 68 !

Lorsque revient l'hiver avec l'urgence de survivre au froid, à la grisaille, à l'isolement les livres heureusement, nous ouvrent l'esprit sur les choses de la vie.

Bibliographie:
  • Survivre à l'hiver, Bernd Heinrich, Collection Biophilia n°15, éditions Corti, 2018

Sur internet:

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