Port des Barques
vendredi 10 juillet 2020
"Un futur sans poids", dernier hommage au poète Françoise Hàn
Il n'y a pas eu d'adieu
Le soir est passé
pareil à tous les soirs
comme s'il devait y avoir
un lendemain
les choses n'ont pas
murmuré entre elles
le sel de la terre
dans son filon
le sel n'a pas noirci
de la plaine à la mer
il n'y a pas eu de signe
à travers nuit
aucune fêlure
n'a rayé la faïence peinte
au-dessus de nos têtes
Quelqu'un
s'est éloigné dans l'invisible
l'a voulu sans doute ainsi
ne pas déranger
les milliards d'étoiles
aller son chemin
sans soulever la poussière
ne pas froisser le pli
du temps qui retombe
se dissoudre dans
l'ailleurs à jamais
sans y laisser de déchirure
Françoise Hàn, in Un été sans fin, éditions Jacques Brémond 2008
L'auteure, aussi discrète que passionnée, vient de nous quitter. Elle fréquentait régulièrement les allées du Marché de la Poésie, où je l'ai croisée à plusieurs reprises.
Son recueil, Un été sans fin, acheté sur le stand de Jacques Brémond, m'accompagne, depuis.
Le premier article écrit à propos du poète était intitulé Le vide est mon élan, il est paru sur La Pierre et le sel le 9 septembre 2013; le second intitulé, Il n'y a plus d'étoiles à atteindre, est paru sur Le Temps bleu, le 8 mars 2019. Vous trouverez plus bas, en annexe, les liens pour ces deux articles.
Vers
Aucun langage ne lui parvient
ni celui qu'échangent
la terre et l'eau
l'air et le feu
ni celui de la ville au petit jour
ni celui des vents de sable
sur les plus anciens déserts
pas même les mots perdus
dans les marges du poème
si longue soit leur errance
une figure de l'espace
s'est refermée sur lui
la suture
s'en est effacée
Parler de lui à la terre
où reste une empreinte
de ses pas
à la source qui garde
sous les eaux son image
à l'air qui s'est ouvert
devant lui
au feu son dernier élément
le dire dans la rumeur
de la cité au bord du fleuve
dans le vent qui passe chargé
d'années lointaines
dans les quatre directions de l'espace
et l'unique direction
de la flèche du temps
l'écrire pour que la page
se couvre du soleil
de sa présence
matins midis et soirs
de sa présence
pierres blanches
à chaque ligne en allée vers
l'inachevé du poème
un futur sans poids
ibid
Bibliographie:
Françoise Hàn, Un été sans fin, éditions Jacques Brémond, 2008
sur internet:
https://pierresel.typepad.fr/la-pierre-et-le-sel/2013/09/fran%C3%A7oise-h%C3%A0n-le-vide-est-mon-%C3%A9lan.html
http://lintula94.blogspot.com/2019/03/francoise-han-il-ny-plus-detoiles.html
http://www.m-e-l.fr/,ec,125
https://www.actualitte.com/article/monde-edition/deces-de-la-poetesse-francoise-han/101591
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