Le haïku, évangile du terrestre, écrit Alain Lévêque dans son recueil Ombre portée,
le haïku, poème des saisons, poème du temps qui vibre, le haïku poème de l'instant.
Le haïku, acte de présence au monde. mise en mouvement, en musique, en harmonie des
fibres qui nous unissent à la réalité terrestre et qui tressent le lien premier, la corde originelle
de l'arc d'os et de terre que nous sommes et que nous voulons être encore malgré la fatigue
d'exister et la mauvaise cendre des religions.
in Ombre portée, d'Alain Lévêque, aux éditions de L'ermitage, 1980
Relisant ces mots du poète, j'ai le plaisir de vous offrir aujourd'hui un éventail de
cet art ancestral venu du Japon, reflet fidèle d'instants saisis sur le vif :
Devant le chrysanthème blanc
Ils hésitent un instant
Les ciseaux
Buson, 1715-1783
Elle s'est posée sur mon épaule
Elle cherche une compagnie
La libellule rouge
Sôseki, 1865-1915
Ça et là
Le museau d'un cerf
Sous le taillis
Shiki, 1866-1902
J'ai rencontré la vache
Que j'avais vendue l'an dernier
Vent d'automne
Oemaru, 1719-1805
Foulant des violettes
La vache avance
Quelle élégance !
Fujio, né en 1901
Oie, oie sauvage
Tu l'as fait à quel âge
Ton premier voyage ?
Issa, 1763-1828
Ces haïkus sont extraits du recueil Fourmis sans ombre, Le livre du haïku, anthologie-promenade, éditée par Phébus libretto, en 1978.
Rêvant de connaitre le Japon, berceau de cet art, j'ai eu la chance d'échanger longtemps par
courrier avec un ami japonais, architecte, vivant à Tokyo.
Il glissait toujours dans l'enveloppe, à mon intention, un de ses haïkus présenté tel un idéogramme
et accompagné de sa traduction en français.
J'ai eu par la suite le plaisir de m'essayer à cette écriture, dans le cadre du Kukaï de Paris.
Les trois haïkus, cités ci-dessous, sont miens et figurent dans la deuxième anthologie,
La vallée éblouie, publiée par le groupe d'haïkistes du Kukaï de Paris, en 2014 :
La maison vendue
ton magnolia préféré
choisit de mourir
in La Vallée éblouie
Deuxième anthologie de haïkus du Kukaï de Paris
éditions unicité 2014, p.68, n°126
*
Bourrasques d'avril
les roses s'effeuillent
sans songer à vieillir
ibid p.54, n°91
*
Dimanche pluvieux
trancher les pages d'un livre
religieusement
ibid p79, n° 154
Bibliographie:
- Fourmis sans ombres, Le Livre du haïku, Phébus libretto, anthologie promenade par Maurice Coyaud, 1999.
- La Vallée éblouie, deuxième anthologie de haïkus du Kukaï de Paris, éditions unicité 2014
- un précédent article de Roselyne Fritel, paru sur La Pierre et le sel, en 2012, dont voici le lien :
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