L'exercice m'avait révélé un secret : on gagne toujours à augmenter les réglages de sa propre fréquence de réception.
Jamais je n'avais vécu dans une vibration des sens aussi aiguisée que pendant ces semaines tibétaines.
Une fois chez moi, je continuerais à regarder le monde de toutes mes forces, à en scruter les zones d'ombre.
Peu importe qu'il n'y eût
pas de panthère à l'ordre du jour.
Se tenir à l'affût est une ligne de conduite.
Ainsi la vie ne passe-t-elle pas l'air de rien.
On peut tenir l'affût sous le tilleul en bas de chez soi, devant les nuages du ciel et même à la table de ses amis.
Dans ce monde, il survient plus de choses qu'on ne croit.
Regarder une bête, c'était coller l'œil à un judas magique.
Derrière la porte, les arrières-mondes.
Nul verbe pour les traduire,
nul pinceau pour les peindre.
Tout juste pouvait-on en capter un scintillement.
William Blake dans "Proverbes de l'enfer" : "Ne comprends-tu donc pas que le moindre oiseau qui fend l'air est un immense monde de délices fermé à tes cinq sens ?"
Sylvain Tesson, in Habiter poétiquement le monde, p.p. 441, éditions Poesis, 2020.
L'auteur, né en 1972, à Paris, est un écrivain voyageur, géographe de formation.
Il a reçu le Prix Goncourt 2020 pour La panthère des neiges, paru en 2019
Bibliographie :
Sylvain Tesson, La panthère des neiges, in Anthologie-Manifeste, Habiter poétiquement le Monde, POESIS, 2020
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