Port des Barques
jeudi 29 juin 2017
Thierry Metz à la saison des passereaux
LA MAISON DU RÉCITANT
Vous mes rieuses qui sortez de l'étable
Porteuses d'argile et de graines
Prenez place à mon repas
J'ai coupé l'ortie qui incendiait le seuil
Et vous êtes mes très chaudes
Parées de laines blanches
Et d'écailles
Vous seules qui accédez à l'arbre
Transplanté dans l'éclat
Soyez rafraîchies
1984
in Thierry Metz, Poésies, 1978-1997, éditions Pierre Mainard 2017, p.64
Par ces derniers jours torrides, les mots chaleureux de Thierry Metz, " soyez rafraîchies", nous ont conviés à profiter pleinement de l'ombre, un livre à la main. Je découvre pour la première fois ces poèmes inédits, tout juste publiés et parus chez Pierre Ménard, au mois de mai dernier.
Un ton alerte et généreux, "une fraîcheur d'écrire", saisit le lecteur et le comble. S'adressant à Françoise, son épouse, le poète s'écrie : "je fête une éclaircie", "aller à ta rencontre multiplie mes sentiers", "fraîcheur d'écrire dans la maison rougeoyante"! Cela tient d'un hymne à la joie de vivre que le lecteur partage aussitôt.
Blanche étable qui sommeille
Au large des vignes
Dans les fabulations de l'arbre !
Là est ma demeure :
Un petit lit de paille
Entre portes et fenêtres
Et l'audience d'un chemin
Sur les terrasses du jour.
1984
ibid p.65
Le choix des mots, leur alliance toute personnelle, l'ardeur de la jeunesse, les miracles de l'amour et l'éclat de l'inédit ouvrent au poète des horizons nouveaux: Naître est sans limites.
LUMIÈRE ENSOLEILLÉE
Toi que je bague
Ô oiseau
dans ma cité des Vents
Tresse la maison ardente
Dresse le métier de lumière
car voici l'invitée
gourmande amoureuse
Celle qui devient clairière
quand s'ouvre le linceul :
blanche insolation de mon âme.
1983
***
SAISON DES PASSEREAUX
Oiseaux des champs
Semence de l'ange –
À midi, au cœur de la foudre
Quand éclot le nid du rouge-gorge
Le paysan dénude ses gerbes
Et la saison s'égrène
Entre les mains d'amour
Lumière illuminée.
1983
***
À trois jours du solstice
la nuit éveille ses sources,
Poèmes les barques s'allègent et virent
nébuleuses dans la proximité de l'âtre
Un visage m'accueille
Sur la rive
Braise petite fiancée
celui que tu cherches
est-il sorti de l'aimant.
1985
ibid p.66
Bienfaisante allégresse, de celle qu'éveillent les beaux jours revenus. La terre entière, devenue prétexte à célébrer, nous convie :
Dire une clairière n'est possible
que tôt le matin
avant la fable
quand le coq peut encore trier
graines et hameçons.
ibid Calcaire 1986, p.98
En familier de la nature, Thierry Metz propose de la savourer au présent, au propre comme au figuré et par tous ses sens. Un riche prélude aux vacances !
Douces feuillées
Je vous connais matinales
Vous régalez mes clairières
De songes et de pluies
Vous récitez le chant de plume
Et d'écaille –
Lumière soudaine où puise ma violence
L'épaule si longtemps captive de vos vigueurs
Se dégage et s'arrondit.
Je vous capte essentielles
Ardentes
En vous
Mes Traversées
L'oiseau s'affine
Et passe.
Je suis l'élagueur.
ibid L'érosion éclairante, 1986, p.79
Mais que serait cette rencontre, si nous faisions mine d'ignorer l'élagueur ? Passereaux nous sommes, passereaux nous resterons...profitant pleinement de l'instant.
Bibliographie:
Thierry Metz, Poésies 1978-1997, Pierre Mainard 2017
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