Port des Barques

Port des Barques

vendredi 3 avril 2020

Hala Mohamed, au milieu de nuages qui rient




          Idée 1

         La maison n'est plus qu'une idée
         Au seuil un paillasson bleu sur lequel on peut lire Bienvenue en arabe et en anglais
         Au milieu de nuages qui rient
         Tu sonnes et la porte rit. La maison s'ouvre devant toi et rit. Les chambres, les assiettes, la table
         et la poussière sur les rideaux rient. Le carrelage, comme l'or du soleil qui s'y colore, rit
         Le mur abattu par le bombardement rit. Les décombres où les oiseaux ont construit leurs nids
         rient
         La paille et le nid rient. Le triste roseau du nay, éclaboussé par le ruisseau, et le ruisseau rient
         Les voix restées à la maison de ceux qui sont partis, résonnent encore et rient
         Et celui qui y demeure, demeure dans une photo qui rit, sur un mur qui rit.

         in Prête- moi une fenêtre, Hala Mohammad, Éditions Bruno Doucey, 2018, p.67

À ma porte, un paillasson dit lui aussi Bienvenue, tandis que je m'apprête à ouvrir à mon visiteur.


         Notre maison avait des fenêtres

         Notre maison avait des fenêtres
         Qui donnaient sur les cyprès et les peupliers
         Qui empruntaient aux arbres leurs ombres
         Et les arbres résonnaient de secrets
         Lorsque les soldats voulurent détruire notre maison
         Ils furent terrifiés
         De ne pouvoir lui infliger le moindre dégât
         …
         Nos vêtements
         Les papillons les portent
         …
         Et poésie
         Ce silence autour de nos tailles.

         ibid p.37
       
  La nôtre avait également beaucoup de fenêtres, ouvertes sur le jardin alentour, quand je l'ai
  quittée, de mon plein gré, pour un appartement plus modeste.
  Depuis, il me suffit de me mettre à la fenêtre pour contempler les voyageurs, qui attendent
  l'arrivée d'un train, sur le quai du RER et qui me tiennent compagnie à leur insu.
 
         Les Syriens aiment s'assoir à la fenêtre 2

         Les Syriens aiment s'asseoir à la fenêtre
         Dans les jardins publics
         En face des maisons dont les fenêtres ont vue sur le jardin
         Les Syriens aiment les maisons aux fenêtres grandes ouvertes
         Qui ont vue sur les balcons
         Sur les maisons des voisins
         Aux grandes fenêtres
         Les Syriens aiment entrevoir les gens bouger derrière leurs fenêtres
         Derrière les rideaux transparents
         Ils aiment les maisons éclairées
         Les Syriens se font de la fenêtre un métier
         À force de l'attendre, ils se sont consumés
         Sur les vieux portails en fer de leurs maisons que les tyrans ont ravagées
         Sont encore gravés ces mots des visiteurs :
         Nous sommes passés et nous ne vous avons pas trouvés. La fenêtre était ouverte.

         ibid p.45

        Un proverbe français dit : "Faisons contre mauvaise fortune bon cœur"! Le moment est venu  de
        nous en souvenir durant ces semaines de réclusion prolongées.

Bibliographie:
  • Prête-moi une fenêtre, Hala Mohammad, éditions Bruno Doucey, 2018
sur internet:
        

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